28.12.07

Yak bou-dou.


Le mois de novembre est le mois du yak comme janvier est le mois du cochon.
Craaac...Clac...Clac...A même le sol, l'homme au superbe chapeau en fourrure manie le couperet avec bonne humeur. Les côtes de l'animal se détachent en craquant.
Ça me rappelle "Robert" l'écorché en plastique, héros des cours d'anatomie de mes années lycée. Le gamin de la maison clopine en grignotant une côtelette géante. Les tibétains ont de belles et bonnes dents. Et pour cause!
Les vélos chargés, complètement excitées, nous partons quelques jours au monastère de Chiu au bord du lac Manasarovar. Paysage irréel, demeure de Dieux mystérieux, nous pédalons au centre de l'univers.
Pas de vent aujourd'hui, une lumière d'une violence inouïe, un miracle comme pour nous accueillir dans ce monde sacré.
Le "Kang Rimpoché" domine le plateau. De toute part, il détache sa silhouette reconnaissable sur l'horizon cobalt.
Un porche en plastique d'un bleu criard recouvert d'idéogrammes annonce un premier village: Quelques maisons en terre, l'éternelle caserne où flotte un drapeau rouge sang flanqué d'étoiles jaunes, des poubelles...
Quelques gamins hirsutes poussent des roues de mobylette dans la poussière et nous demandent un yuan.
Des femmes nous hèlent en riant.
Que font-elles au milieu de cette immense mare rouge, couleur habituellement réservée au drapeau chinois?
Elles plongent les mains dans des sceaux en plastique souillé pour ressortir un intestin caoutchouteux, un foie dégoulinant... Mes cours d'anatomie sont bien loin.
La tête du yak tourne le dos à toute cette cuisine. Où vont ses pensées?
Peut être finira-t-elle devant l'autel, éclairée par de petites lampes à huile flageolantes, projetant l'ombre de ses cornes fabuleuses sur le poster en papier glacé du potala.
A moins que, symbole de toute la puissance de l'animal, ses cornes ne se voient gravées de quelques mantras et ornent l'entrée d'une demeure tibétaine. Nous quittons le village en évitant de rouler sur des peaux sanguinolentes séchant au soleil.

Des khatas en lambeaux, des chevaux du vent délavés annoncent le col s'ouvrant sur le lac sacré, le Mapam Tso," le lac des forces invisibles ".
Il répand ses eaux bleutées comme une mer intérieure au fond de la vallée, superbe immensité glacée.
Au sud, une piste isolée se cogne sur les neiges éternelles du Gurla Mandata (7728 m) et nous laisse rêveuses. Elles conduit en Inde et charrie depuis les années 80 des hordes de pèlerins hindous mais nous reste interdite.
Au nord, le "précieux joyau des neiges glacées" ne nous quitte pas des yeux. C'est beau.
Dans la lumière du soir, on se laisse glisser vers la gompa, qui du haut de son rocher d'aigle fait claquer un imbroglio de drapeaux de prière. Irréel !
Au village, au pied du monastère, des gamins s'envoient un ballon en ricanant.
De plus prés, ce ballon parait étrange. Ne serait ce pas le cadavre d'un chiot? Bizarre ! Un chien pouilleux traîne sa misère dans la poussière et reçoit la balle.
Affamé, il la saisit en vol et part en grognant dévorer sa proie.


1 commentaire:

Anonyme a dit…

où sont les images ???