Le coucher de la reine.
Les tibétains n'ont pas le télé, pas l'électricité si ce n'est une ampoule bleutée rechargée au solaire.
Depuis Ali, nous basons nos journées vélocipédiques sur une seule idée fixe: NE PAS CAMPER.
Se resserrer autour d'un poële en fer rouillé où à intervalles réguliers une tibétaine dans un halo orangé déverse quelques crottes séchées, entendre le vent siffler au dehors, se resserrer encore pour accueillir des cavaliers gelés emmitouflés dans des fourrures hirsutes, boire des litres de "chu- ko" brûlantes; se laisser bercer par des incantations répétitives "Om...Ooom maniii...", se réveiller au son et à l'odeur de la baratte à thé " schlourp...schlourp..." au petit jour...
Voilà notre luxe mais quel luxe!
Les tibétains n'ont pas la télé certes, mais en ce mois de décembre ils ont les globe-tortues et c'est bien mieux. Spectacle assuré.
Tous les soirs, comme des enfants, nous avons droit au même rituel. Les voisins, si il y en a s'invitent volontiers. La maison tibétaine semble ouverte à qui veut: on entre discrètement et on repart de la même façon.
Se coucher, se déshabiller un tant soit peu, à un mètre d'yeux écarquillés, curieux mais sans gène aucune n'est pas chose facile.
J'aimerais figer leur expression: Bouche bée, regard enfantin, naïf, concentré sur chacun de nos mouvements. Pas un son, pas une exclamation, un silence absolu.
S'étonnent-ils de tout ce que nous possédons?
Déballer le duvet, étaler le paréo pour se protéger du tapis crasseux, empiler les polaires en guise d'oreiller, se glisser frissonnante dans le sac à viande, puis les regarder en agitant la main et clore le spectacle par des éclats de rire.
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